Orange, Free, SFR les raisons de la discorde
Alors même qu’une consultation publique a été lancée en mai 2008 par l’ARCEP sur la mutualisation de la partie terminale des réseaux en fibre, consultation à laquelle de nombreux acteurs ont répondu ; Les trois opérateurs principaux n’arrivaient toujours pas à s’entendre sur la mutualisation de la partie terminale.
Ce point est capital car il pose le principe qu’un acteur ayant fibré un immeuble doit donner un accès à son réseau aux autres opérateurs.
Le désaccord porte sur le point de mutualisation. Alors que France Télécom prône un raccordement au PRI (Point de Raccordement d’Immeuble), Free quant à lui préconise au NRO (Noeud de Raccordement Optique).
Les deux solutions ne sont pas idéales tant sur les différences des choix technologiques (PON, Point-à-Point), économiques, des zones géographiques, etc (population dense, égouts visitables, …)
Alors où mutualiser ?
Si on se réfère à la synthèse de la consultation publique la solution en pied d’immeuble n’est viable que dans les zones denses, par ailleurs elle peut engendrer un risque de monopoles locaux. En effet, la saturation de l’infrastructure de génie civil peut exister.
La mutualisation en pied d’immeuble est donc considérée par une majorité d’acteurs comme une solution «nécessaire mais non suffisante ».
Au NRO (Noeud de Raccordement Optique) pour la technologie PON le dégroupage n’est pas possible au sens strict. En effet, une fibre part du NRO puis est éclatée en 8 fibres, puis arrive au plus près du client pour être encore une fois éclatée en 8 fibres. La solution consisterai en la pose de fibres surnuméraires et coupleurs. France Télécom y est défavorable, certains souhaitent que la surcapacité de fibre soit obligatoire.
En ce qui concerne le dégroupage pour la technologie Point-à-Point (utilisée par Free), tous les contributeurs sont favorables, elle doit s’appuyer sur celle qui est pratiquée avec le cuivre.
Pour un déploiement efficace de la fibre optique et une concurrence saine le dégroupage au NRO pour la technologie Point-à-Point et par la surcapacité de fibres pour la technologie PON apparaît la solution la plus pertinente en plus de l’offre aux fourreaux de France Télécom et en pied d’immeuble.
La synthèse de l’ARCEP indique : Le coût de la pose de fibres optiques en surcapacité étant marginal par rapport aux autres coûts de déploiement, la plupart des contributeurs se disent favorables à la pose de fibres surnuméraires (…) .
Alors pourquoi France Télécom ne le souhaite-t-il pas ?
Free nous indique que France Télécom souhaite conserver une solution mono-fibre pour garder le monopole d’une partie de la boucle locale fibre. Ce dernier bout permettra de conserver le loyer qu’il perd dans la fin de la boucle locale cuivre.
Par ailleurs, en payant ce loyer à long terme France Télécom ne souhaiterait que trois opérateurs pour limiter la concurrence aux acteurs existants.
En ce sens, Free nous confiait qu’il n’a pas peur de la concurrence, la concurrence nous aide à être bon. Quand vous avez quelqu’un qui vous met des coups de pied au quotidien c’est là que vous avancez. (…) Si on veut de la concurrence dans la fibre il faut qu’on permettre qu’elle existe un jour ou l’autre avec des solutions ouvertes.
C’est la raison pour laquelle Free n’a pas voulu rejoindre l’accord entre SFR et Orange du 24 septembre (mono-fibre) – contraire à la LME d’après lui (Loi de Modernisation de l’Economie) – qui prévoit que L’accès est fourni dans des conditions transparentes et non discriminatoires en un point situé, sauf dans les cas définis par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, hors des limites de propriété privée et permettant le raccordement effectif d’opérateurs tiers, à des conditions économiques, techniques et d’accessibilité raisonnables ; ni celui amendé le 15 octobre (multi-fibres) qui contenait des clauses "inacceptables".
Quant à Orange, dans une interview accordée au Journal des Télécoms, Louis-Pierre Wenes – Directeur Exécutif d’Orange France – indique que le point de mutualisation est un faux débat (…). En effet si le point de mutualisation doit être en dehors de l’immeuble. pourquoi ne pas remonter au NRO (…) et quid alors des investissements des opérateurs qui ont fait l’effort de déployer jusque dans la rue ?.
La solution de déployer deux fibres par logement – utilisée par Free – soulève des problématiques non résolues, ni même étudiées concrètement. En effet, (…) plusieurs opérateurs peuvent souhaiter avoir accès à cette fibre.
Vers une entente cordiale ?
Le gouvernement Besson n’a pas tardé à réagir pour "fixer les règles de mutualisation". En ce sens, demain va se tenir une réunion avec les principaux opérateurs. "Un comité de pilotage du très haut débit va être mis en place".
Ainsi, Orange va tester le mono et multi-fibres tandis que Free uniquement la dernière technologie. L’ARCEP à la phase finale des tests validera la ou les méthodes de mutualisation.
Ce comité ne remettra pas en cause les mutualisations déjà effectives si l’une des méthodes est privilégiée au profit de l’autre. Les résultats devraient être publiés au 31 mars 2009 et pour ne pas citer Maxime Lombardini "on n’est pas à trois mois près" 🙂