Canal+ assure gagner enfin des abonnés en France après une longue fuite massive
Après avoir perdu plus de 200 000 abonnés en France en 2018 et 195 000 l’année dernière, Canal+ annonce avoir sorti la tête de l’eau commercialement en 2020. Entre baisse des prix et enrichissement de ses offres via une idylle avec ses rivaux américains.
L’arrivée de Téléfoot cet été n’a pas réellement impacté sa base de clients, bien au contraire. “Nous enregistrons pour la première fois depuis longtemps, une croissance de notre parc d’abonnés en France“, assure aujourd’hui Maxime Saada dans une interview accordée aux Echos. Reste qu’il est aujourd’hui impossible de calculer la base d’abonnés individuels de Canal+ dans l’hexagone, sa maison-mère Vivendi a soudainement fait le choix d’être le plus bref possible dans ses résultats financiers et commerciaux. Au troisième trimestre, la filiale du groupe de Vincent Bolloré revendique 8,6 millions de clients individuels et collectifs, sans distinction, l’heure est au mélange en guise de gonflette et non à la transparence.
En effet, depuis un an, à la suite de l’intégration de sa nouvelle acquisition à savoir l’opérateur de télévision payante M7, le décompte du portefeuille du groupe a été harmonisé pour l’ensemble de ses territoires afin de prendre en compte les abonnements collectifs. L’impact en France est de plusieurs centaines de milliers d’abonnements supplémentaires.
Plus étonnant encore, Canal+ a revendiqué près de 7,8 millions d’ abonnés individuels au premier trimestre 2020 dans l’hexagone contre environ 7,9 millions fin décembre 2019. Mais depuis, le groupe ne fait plus mention de l’évolution de sa base d’abonnés dans la présentation trimestrielle de ses chiffres, on préfère parler de chiffre d’affaires. Quoiqu’il en soit, après avoir perdu officiellement 195 000 abonnés en 2019, le groupe Canal+ annonce donc aujourd’hui par la voix de son patron, avoir redressé la barre en France et se permet même de ne plus proposer son bouquet Famille by Canal chez Orange.
Seul le partenariat avec Free poursuit son chemin. L’heure n’était d’ailleurs pas à la fête il y a un an pour les abonnements vendus indirectement par Canal+, sa base d’abonnés Wholesale a baissée de 50 000 abonnés en 2019 alors que le portefeuille d’abonnés à la chaîne Canal+ a enregistré une croissance de bon augure.
Netflix, Disney+, myCanal , la stratégie de Canal+ fonctionne
Il faut aujourd’hui le dire, Canal+ a eu le courage de faire face à la concurrence des géants de la SVOD en se réformant mais aussi en pactisant avec certains d’entre-eux. La filiale de Vivendi a en effet changé d’angle d’attaque en 2019, en se transformant progressivement en agrégateur de contenus. Elle a d’abord intégré Netflix dans certaines de ses offres puis Disney+ cette fois en exclusivité, sans oublier la signature d’un accord avec beIN Sports lui permettant de diffuser 28 des affiches de la Ligue 1 sur la période 2020-2024. Ajouté à cela, la Ligue des Champions dès la saison prochaine. Dans ces accords, Canal+ “a réinvesti une large partie des sommes initialement consacrées à l’appel d’offres Ligue 1”, remporté par Mediapro, explique Maxime Saada. Et d’ajouter : “cette stratégie fonctionne et il n’est pas question de faire plonger Canal+ dans le rouge en réinvestissant à perte dans le football”.
Le nouveau modèle de Canal+ est conçu pour mieux rivaliser avec les plateformes américaines, assure son patron.“Nous sommes devenus un acteur clef du digital avec notre application myCanal, ses 15 millions d’utilisateurs mensuels, qui dépassera en 2020 le milliard et demi de contenus consommés en streaming contre un milliard un an plus tôt.” Sa plateforme, armée pour séduire sur plusieurs marchés dans lesquels Canal+ est implanté, se démarque selon lui par “l’agrégation de 200 chaînes de télévision en live”, mais aussi “de la presse, des livres audio, des podcasts, des bandes dessinées, et demain peut-être de la musique”. Aujourd’hui 70% des abonnés Canal utilisent sa plateforme numérique.
Une politique de baisse des prix mais…
L’autre facteur important de la relance de Canal+ en France, au-delà de l’enrichissement de ses offres, c’est une baisse des prix, assure Maxime Saada : “Le prix d’accès à Canal+ est maintenant de 20 euros, et pour les moins de 26 ans c’est moins de 10euros. Et, dans le même temps, le prix des abonnements aux offres concurrentes a eu tendance à augmenter. L’écart de prix se réduit et n’oubliez pas que nous offrons 300 films en première exclusivité, près de 60 séries, et les compétitions sportives les plus prestigieuses”.
Reste que Canal+ représentait encore la grande majorité des résiliations de bouquets TV en France en 2019. D’après un observatoire du site résilier.com, la filiale de Vivendi a comptabilisé à elle seule 86% des résiliations. Avec pour premier motif, le prix du bouquet proposé constituant 37% des fuites d’abonnés.
A contrario, le motif principal de souscription chez Canal+ est résolument le contenu, avec 33% des abonnements motivés par cet aspect. Netflix, Disney+ et l’intégration de beIN Sports ont sans l’ombre d’un doute décuplé l’attractivité des offres Canal. De quoi séduire à nouveau, c’est incontestable. Le groupe prévoit à présent d’alimenter la montée en puissance de myCanal mais aussi de “multiplier les synergies avec Universal Music, Editis ou encore Dailymotion”. Serein.