Fibre optique : un chantier en bonne voie, mais traînant encore ses problèmes et interrogations
Tous s’accordent sur un chantier en bonne voie. Il reste toutefois de grosses difficultés sur le terrain, mais aussi à s’interroger sur l’après, pour les utilisateurs comme pour la filière.
Oui, mais. Ne niant pas que “le chantier de la fibre avance à grands pas” et qu’il s’agit du “seul grand chantier d’infrastructures en avance en France”, les acteurs de la fibre optique présents les 6 et 7 octobre à Saint-Étienne, dans le cadre de l’Université du THD, n’ont pas manqué de rappeler qu’il y a encore du pain sur la planche.
“Le satisfecit est général quant au rythme national de déploiement. La politique partenariale a parfaitement fonctionné et permettra de dépasser l’objectif 2022 du plan France THD : le THD accessible pour tous les Français, dont 80 % en fibre optique”, a en effet expliqué Infranum, notant que “la courbe des abonnements fibre croisera bientôt celle des abonnés au DSL (attendue au 3e ou 4e trimestre 2021)”. La fédération note toutefois que “le chantier n’est pas terminé”. Et d’expliquer que “l’horizon 2025 – la fibre pour tous, nécessite de rendre raccordables encore un tiers des foyers et entreprises français”.
Des raccordements complexes, une pérennité “à prioriser”
Pour venir à bout de ce “chantier titanesque” dans les temps, la filière liste certains freins à lever. La filière mentionne notamment “les prises les plus difficiles sont à déployer et à raccorder”, sous-entendant l’aspect financement faisant régulièrement grincer quelques dents, mais aussi que “la qualité et la pérennité des réseaux est à prioriser”, en référence au travail mal fait qui donnait de l’urticaire à Sébastien Soriano, l’ancien président de l’Arcep, et qui débouche sur des échecs de raccordement pour les abonnés.
À ce sujet, Fabienne Dulac, CEO d’Orange France, a annoncé que les taux d’échec de raccordement sont passés de 25 à 17 % en l’espace de quelques mois. Pour Infranum, c’est le signe que “le contrat-cadre dit STOC V2, commence à porter ses fruits”.
Des “difficultés opérationnelles importantes”
Infranum pointe du doigt des “difficultés opérationnelles importantes“, au-delà de “bons chiffres globaux”. Au rang des problèmes : la pénurie de poteaux, la disponibilité de la sous-traitance, l’infrastructure répertoriée, mais non existante, les problèmes d’élagage, les difficultés d’accès dans certaines copropriétés et les raccordements longs, complexes ou spécifiques.
La fédération s’interroge également sur une partie des déploiements. “Si les déploiements en zones RIP marquent une accélération très nette en 2021, les pouvoirs publics restent très attentifs au bon achèvement des déploiements en zone d’initiative privée”, explique-t-elle.
Au sujet du déploiement dans les zones rurales, Cédric O a annoncé un accord sur les modalités d’accès aux appuis communs. “L’énorme travail mené par Infranum, Enedis, l’Avicca et les services de l’État, pour accélérer le rythme des déploiements dans les zones rurales grâce à l’utilisation de ces poteaux électriques, devrait ainsi déboucher sur un arrêté très attendu qui va concerner au total 5 millions de supports”, a confirmé de son côté Patrick Chaize, sénateur de l’Ain et président de l’Avicca.
Un service universel comme l’eau et l’électricité
Cédric O a salué tout le travail accompli. Le Secrétaire d’État chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques a aussi rappelé ses exigences en matière de qualité des réseaux, avec en tête un très haut débit amené à devenir un service universel au même titre que l’eau et l’électricité. “Une consultation publique a été lancée ce matin sur la définition de ce service universel, car il faut travailler à une formalisation juridique”, explique Cédric O.
Symboliquement, cette nouvelle édition de l’Université du THD s’est d’ailleurs déroulée dans la Loire, “un territoire numérique exemplaire” en matière de très haut débit. 100 % de sa zone publique est en effet finalisée.
Et après ?
Après le déploiement de toute cette nouvelle connectivité, se pose évidemment la question des usages. “Déployer et raccorder n’ont d’intérêt que si cela apporte un meilleur service aux citoyens. La question des usages, de l’inclusion numérique et des territoires intelligents s’annonce alors comme l’étape d’après”, explique ainsi Infranum.
L’avenir de la filière, c’est par ailleurs la possibilité pour la France de rayonner grâce à son savoir-faire en la matière. “Loin de s’éteindre avec l’échéance finale du plan France THD, les perspectives pour cette jeune filière stratégique sont nombreuses. D’autant que l’excellence française désormais reconnue (la France est en tête des pays européens en termes de nombre de prises déployées et raccordées) offre de réelles opportunités à l’international”, explique Infranum. Toujours concernant l’avenir des 33 000 collaborateurs directs que compte désormais la filière, Cédric O a en tout cas confirmé qu’il fallait commencer à “travailler à la bascule”.
Sans oublier la question du démantèlement du réseau cuivre, qui fait aussi partie de l’équation. “Le fibrage de toute la France pose alors la question de l'(in)utilité à terme du réseau cuivre historique. Sa dépose devient, pour des raisons économiques et environnementales, un enjeu évident, mais le chantier est gigantesque”, rappelle Infranum. “Le décommissionnement du cuivre, qui doit l’encourager, reste un sujet complexe auquel nous sommes attentifs”, assure Étienne Dugas, président de la fédération.