Conséquences du mariage Numericable-SFR : les prophéties de Xavier Niel se révèlent exactes
Robin des bois des télécoms et maintenant Nostradamus des effets secondaires liés au rachat de SFR par Numericable.
Interviewé par les Echos en mars 2014, Xavier Niel avait joué au jeu de la boule de cristal en marge du combat que se livrait Bouygues et Numericable pour racheter SFR. L’occasion trois ans plus tard de vérifier la véracité des propos du fondateur de Free comme l’a fait CableReview.
Les licenciements chez SFR
Partisan du rachat de SFR par Bouygues puisque cela aurait permis à Free entre autres d’obtenir 15 000 antennes, Xavier Niel était apparu beaucoup moins tendre envers Patrick Drahi qu’il considérait comme un « industriel solide » et un « gros LBO ». Au point de ne pas croire un instant à une issue positive pour l’emploi en cas de mariage entre SFR et Numericable :
« ( Patrick Drahi) explique qu’il n’y aura pas de plan social, mais quand il a racheté Noos en 2006, 60% des effectifs ont été licenciés. Et je ne vous parle même pas du cas israélien, où les effectifs de l’opérateur Hot sont passés de 4.500 à 2.000. Appliquez le même ratio à SFR… Cela fait 5.000 départs. »
Résultat, le groupe a annoncé durant l’été 2016 qu’il comptait supprimer 5 000 emplois, soit un tiers de ses effectifs à partir de fin 2017. Avant que le 10 avril dernier, la direction de SFR ne transmette aux instances représentatives du personnel, le Livre 2, qui va régir la réorganisation du pôle télécom du groupe qui aura pour conséquence la suppression d’environ 3280 postes.
Le manque d’investissement dans le FTTH
« Avec l’option Numericable, c’est clairement la fin du plan très haut débit du gouvernement. Ils ne vont plus investir dans le FTTH (la fibre jusqu’au logement), en tout cas pas autant que SFR seul, puisqu’ils vont passer par le câble pour limiter les dépenses sur au moins 8 millions de prises », présageait Xavier Niel et encore une fois la situation actuelle est sensiblement identique, SFR privilégie la modernisation de son réseau câble plutôt que d’investir dans le FTTH et s’en défend à l’instar de Michel Combes en 2016 : « Aujourd’hui, beaucoup de clients préfèrent notre technologie, que ce soit du câble ou de la fibre. D’abord parce que notre techno amène du gigabit à domicile. Et ça, même sur sa fibre, Orange n’est pas toujours capable d’en faire autant. D’autre part, le FTTB , ou câble, évite de refaire « un trou dans le mur » chez le client ».
Un endettement extrême en ligne de mire
En cas de rachat de SFR par Patrick Drahi, « cela va créer un acteur extrêmement endetté, et qui ne croît pas. Il lui faudra générer un maximum de cash pour servir sa dette, ce qui va enlever toute agressivité commerciale à SFR, comprimer les investissements et nous apporter de nouveaux abonnés », imaginait en 2014 Xavier Niel et sa prédiction se confirme également puisque la question de l’endettement est au cœur des préoccupations entourant Altice et Numericable-SFR. Entre 2014 et 2016, Altice a doublé sa dette (50 milliards). En mars 2016, on vous annonçait également que l’endettement net de SFR était de 14,4 milliards soit un ratio de 3,7x. S’agissant de la hausse des prix, les abonnés peuvent également l’attester, la location de la box devenant payante (3 ou 5 euros suivant les offres) dès 2016 et la succession d’augmentations de forfaits sur le fixe et sur le mobile vont dans le sens du patron d’Iliad.
La perte de l’exclusivité des chaînes premium de Canalsat
« L’alliance de Vivendi et de Numericable pose d’énormes problèmes. Les deux candidats au rachat de SFR subiront vraisemblablement une instruction sur le volet concurrence approfondie et longue. Aujourd’hui, les tarifs élevés de Numericable reposent sur des exclusivités pour les chaînes premium de Canalsat et de Numericable. L’Autorité de la concurrence demandera, espérons-nous, de les faire disparaître en cas de rachat de SFR par Numericable. »
Xavier Niel a vu juste puisque un an plus tard, l’Autorité de la Concurrence a décidé de mettre fin à « l’exception Numericable » qui pouvait reprendre dans ses offres les chaînes exclusives de Canalsat. Jusque là, Canalsat disposait d’une exclusivité d’une cinquantaine de chaînes (Eurosport, Syfy, etc.) pour le satellite, la fibre et l’ADSL. Seule exception, le câble, qui pouvait ainsi reprendre ces chaînes exclusives. Mais les choses ont changé depuis que Numericable a racheté SFR. En effet, les deux réseaux ayant fusionné, il n’était donc plus possible de faire la distinction Câble/ADSL. Canalsat a donc demandé la fin de ce privilège à l’Autorité de la concurrence qui lui a finalement accordé. La suppression de ces chaînes s’est ensuite faite progressivement.