La Quadrature du Net appelle le Sénat à rejeter la surveillance généralisée
L’étau se resserre. L’examen du projet de loi sur le renseignement a commencé au Sénat. Ainsi que nous vous l’indiquions, les sénateurs discutent du projet de loi relatif au renseignement, adopté le 5 mai dernier par les députés de l’Assemblée nationale. Le projet de loi est actuellement examiné au Sénat (le 2, 3 et 4 juin) et sera voté le 9 juin 2015. Présenté le 19 mars en Conseil des Ministres par le premier ministre Manuel Valls, ce texte a fait l’objet d’une procédure d’urgence. De nombreux sénateurs, tous groupes confondus, ont déposé plusieurs dizaines d’amendements qui dénoncent et pointent les dangers majeurs du projet de loi.
La Quadrature du Net rappelle son opposition de fond à un texte « donnant aux services de renseignement un champ d’action trop large et des technologies de surveillance de masse sans réel contrôle (…) Un texte auquel de très nombreux acteurs reprochent un déséquilibre profond en défaveur des libertés fondamentales ».
Périmètre trop large et indéfini des champs d’action des services de renseignement : comme de nombreux députés, la Quadrature rappelle que plusieurs sénateurs soulignent les dangers d’un périmètre incluant les « violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique » (Amendement n° 69), les « intérêts économiques et scientifiques » de la France ou les « intérêts essentiels de la politique étrangère de la France ».
Contrôler la commission nationale de contrôle (CNCTR) : un travail de renforcement de la CNCTR a déjà débuté afin que la commission puisse avoir un réel pouvoir d’autorisation (Amendement n° 47) des interceptions administratives, et non seulement un avis consultatif que les services du Premier Ministre peuvent ignorer. C’est à cette seule condition que cette Commission peut être autre chose qu’un leurre en matière de contrôle effectif des services. De même, plusieurs amendements proposent une effectivité des capacités de contrôle, a posteriori des interceptions par une centralisation ou une cogestion des données par la CNCTR, de préférence assistée par la CNIL (Amendement n° 99), précise La Quadrature.
Techniques de surveillance de masse : de nombreux parlementaires proposent purement et simplement la suppression des techniques les plus attentatoires aux libertés fondamentales (amendements n° 6, 25, 38, 101, 116 et 59). Les articles 851-3 et 851-4, permettant des interceptions directes sur les réseaux et mettant en place des techniques de surveillance algorithmique susceptibles de s’appliquer aux communications de tout citoyen, sont particulières visées. De même, les interceptions massives de données de personnes non ciblées permises par les IMSI-Catcher font l’objet de plusieurs amendements de limitation (Amendements n° 15, 20, 70, 103, 24).
Adrienne Charmet, coordinatrice des campagnes de La Quadrature du Net., a déclaré, « comme nous le soulignons depuis le mois de mars avec les nombreux détracteurs du projet de loi, seule la suppression des mesures de surveillance indiscriminée et des mesures les plus intrusives permettrait de le rendre respectueux des libertés fondamentales. Il est donc peu probable que le Sénat puisse faire aboutir un texte acceptable et le rejet global du texte est la seule solution envisageable ».
Elle appelle les citoyens « à demander à leurs élus de défendre l’État de droit et les libertés fondamentales lors de ce vote au Sénat, où les amendements déposés devront être défendus pour obliger le gouvernement à justifier ses positions ambiguës et dangereuses ».
En effet, durant de longues semaines, Univers Freebox en organisant un débat avec la Quadrature du Net, la Ligue des Droits de l’Homme, le syndicat de la Magistrature, le syndicat des Avocats de France, Amnesty International et bien d’autres organisations et associations, ont dénoncé cette loi. Le régulateur des Télécoms a également publié ses craintes, face à la nuisance de cette loi sur l’intégrité et la disponibilité des réseaux.
Le texte intègre de nombreux articles autorisant l’interception de l’ensemble des données de tous les citoyens français en temps réel sur Internet, via différents outils de détection des comportements dits « anormaux ». Les moyens pour intercepter les données sont plus ou moins étonnants : backdoor, mise en place d’algorithmes de détection au cœur des réseaux des opérateurs… Cette loi permettra également d’utiliser des dispositifs pouvant capter, dans un rayon de l’ordre de 500 m à 1 km, les données de connexion des téléphones et même dans certains cas les communications elles-mêmes.