Rachat de SFR : “ces démarches hostiles masquent la faiblesse du projet de Bouygues”
Alors que Martin Bouygues tire ses dernières cartouches pour s’accaparer SFR, Vivendi se trouve dans une position particulière. D’un coté, la fidélité promise à Altice, et ce jusqu’au 4 avril, de l’autre, le dernier menu proposé par Bouygues Telecom : 13,15 milliards d’euros tout chaud en cash, accompagné de 21,5 % du capital de la nouvelle entité, sur coulis de 15 milliards d’euros de synergies. En dessert, Martin réitère ses promesses sur l’emploi et l’investissement.
Le PDG de Bouygues a été clair, son offre ne tient que jusqu’au 8 avril. Soit 4 jours après la fin de la période d’exclusivité accordée à Altice par Vivendi. Cette situation posait quelques problèmes, d’abord pour les actionnaires minoritaires de SFR, qui via une lettre à Jean-René Fourtou, le sommant d’étudier les deux offres de manière objectives. Ceci n’étant pas prévu dans le cadre de la période d’exclusivité liant SFR et Numéricable, la menace de "plusieurs milliards d’euros de préjudice" planait sur Vivendi, si le conseil de surveillance défiait son propre engagement.
Pour résumer, Bouygues claque des dents : "En droit des sociétés, Vivendi doit prendre la meilleure décision dans son intérêt. Il a donc l’obligation de revoir notre offre, de la recomparer. C’est une situation nouvelle. Vivendi ne pourra pas prouver sa bonne foi devant les tribunaux s’il continue les négociations avec Numericable" expliquait une source proche de Bouygues aux Echos.
S’il en était ainsi, Numéricable pourrait lui aussi en venir au tribunal : "L’exclusivité signifie que le vendeur n’a pas le droit de discuter avec d’autres parties pendant la période des trois semaines. Si ce principe n’est pas respecté, des recours pourraient être envisagés", lit-on aussi dans les Echos.
La tension qui commençait à atteindre un niveau curieux, monte d’un cran aujourd’hui, lorsque Jean-René Fourtou a promis via une lettre à Martin Bouygues "d’examiner cette offre avec toute la rigueur nécessaire", mais toujours "en application de stricte de notre engagement d’exclusivité".
Pendant ce temps, dans les gradins, les analystes sont en feu. Une étude du courtier Kepler Cheuvreux indique que le projet de Numéricable totalise 14 milliards d’euros post-synergies, contre 15 milliards pour Bouygues.
Le trouble s’épaissit lorsqu’une source proche d’Altice confie à ZDNet.fr : "ces interventions, ces démarches hostiles masquent clairement la faiblesse du projet de Bouygues". L’agitation semble équivalente des deux cotés.
"Vivendi va-t-il prendre le risque alors que les négociations avec Altice sont déjà bien avancées ? Car les deux groupes en sont à détailler l’exécution du projet, nous sommes déjà d’accord sur de nombreux points. On peut également s’interroger sur le ton menaçant de Bouygues, difficile de croire que cela va servir leur relation avec Vivendi… ", poursuit-elle.
"Numericable s’est engagé formellement auprès de Vivendi en matière d’emploi, on attend toujours la même chose du côté de Bouygues : des engagements, pas des promesses." Tacle en conclusion la source de ZDNet.
Tout est désormais en mains de Vivendi, qui devrait prendre sa décision sans plus tarder, sauf hypothétique surenchère. "Numericable se doit de surenchérir d’1 milliard d’euros s’il veut emporter le morceau" rappelle Kepler Cheuvreux à Wansquare.