SFR doit s’incliner face à l’Arcep et Free
La Cour d’Appel de Paris donne raison à l’Arcep face à SFR dans le cadre d’un ancien différend l’opposant à Free.
Dans un arrêt du 20 avril 2023, la Cour d’Appel de Paris a confirmé la décision de règlement de différend de l’Arcep en faveur de Free concernant les conditions de l’accès aux réseaux en fibre optique de l’ex-SFR FTTH en zones moins denses d’initiative privée, a révélé hier le régulateur.
Saisi par l’opérateur de Xavier Niel, la formation RDPI (règlement des différends, de poursuite et d’instruction) de l’Arcep avait rendu une décision le 17 décembre 2020 avant qu’SFR ne fasse appel devant la Cour d’Appel de Paris.
Désireux de lancer ses offres fibre sur tous les réseaux d’initiative publique même à faible part de marché, Free a dû faire face à plusieurs points il y a trois ans. Lors d’une audition devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée Nationale, Maxime Lombardini, vice président d’Iliad s’était plaint de “difficultés contractuelles pour aboutir” sur des réseaux où Free n’est pas encore présent. Et de viser tout particulièrement SFR. L’opérateur a alors annoncé avoir saisi l’Arcep sur les conditions d’accès aux RIP de la filiale d’Altice, qu’il juge “inacceptables”.
La formation RDPI avait estimé que le contrat de SFR FTTH ne fournissait pas les garanties suffisantes en matière de prévisibilité et de transparence concernant le maintien des droits d’usage en cas de transfert du réseau ou de changement capitalistique. La filiale d’Altice s’est alors vu imposer de proposer à Free “un projet de contrat modifié prévoyant notamment que la continuité des droits d’usage et des conditions essentielles d’accès soit assurée, avec une juste indemnisation en cas de résiliation ou perte de tout ou partie de ces droits d’usage ou conditions essentielles d’accès”, explique aujourd’hui l’Arcep.
Sur ce point, la Cour valide le raisonnement du régulateur estimant notamment que « l’insertion d’une clause d’indemnité participe […] de l’effectivité du maintien des droits d’usage et apporte à l’opérateur cofinanceur des garanties quant aux conditions d’accès au réseau déployé en contrepartie de son cofinancement pour lui permettre de rentabiliser son investissement ».
Sur la demande d’encadrement de la faculté de SFR FTTH de modifier unilatéralement ses tarifs
A ce sujet, la Cour d’appel de Paris valide une nouvelle fois le raisonnement de la formation RDPI en estimant notamment qu’elle “a fait une exacte application des principes de transparence et d’objectivité en vertu desquels la tarification mise en œuvre par l’[opérateur d’infrastructure] doit pouvoir être justifiée à partir d’éléments de coûts clairs et opposables et toute évolution tarifaire être justifiée par des éléments objectifs”.
Tarifs en zone AMII
En février 2020, SFR a revu à la hausse ses tarifs de gros facturés aux opérateurs pour se raccorder à son réseau fibre en zone moyennement dense, à savoir en zone AMII. De quoi faire grincer des dents Orange, Free, et Bouygues. Ce dernier avait alors demandé un arbitrage auprès de l’Arcep. Le régulateur s’était lui aussi montré agacé : “L’Arcep ne laissera pas de passager clandestin dans le système. Elle ne laissera pas un acteur profiter de la situation pour pratiquer des prix plus élevés en ayant instauré un monopole privé”, avait fait savoir son président de l’époque, Sébastien Soriano.
De son côté, SFR a expliqué que la révision de ses tarifs de gros n’est seulement que de “quelques centimes”. Selon lui, cette hausse lui permet de « tenir compte des coûts de maintenance plus importants, du fait notamment de dégradations ». L’Arcep a très rapidement sorti son bâton de gendarme en annulant la hausse des tarifs d’accès au réseau fibre de SFR dans cette zone. SFR FTTH s’est vu imposer “d’ajuster ses tarifs dans la partie AMII de la zone « SFMD »au niveau demandé par Free, c’est à dire, un tarif de cofinancement ab initio par ligne ne dépassant pas 513,6 € et une redevance mensuelle par ligne ne dépassant 5,12 € pour un cofinancement à hauteur de 20 %”, rappelle le régulateur.
Une fois de plus, la Cour d’Appel de Paris confirme la décision de l’Autorité dans son ensemble.“A cet égard, elle valide l’utilisation, pour trancher le différend, des modèles de coûts de boucle locale optique mutualisée et de tarification de l’Arcep, qui ont été à plusieurs reprises mis en consultation publique et relève de nouveau que SFR FTTH s’est abstenu de fournir ses coûts de déploiement, « fût-ce de manière agrégée » pour justifier du caractère raisonnable de ses tarifs”.