Par crainte d’écoutes américaines, l’Etat surveille la vente de centaines de sites à Paris
Les négociations pour le rachat de 600 sites sur les toits de Paris font l’objet d’une vigilance accrue de la part du ministère de l’Économie et des Finances.
Depuis mars dernier, deux TowerCo négocient pour la vente d’un total de 1226 sites télécoms en France. Phoenix Tower International voudrait en effet récupérer ces infrastructures auprès de l’espagnol Cellnex et parmi ces acquisitions, 600 toits-terrasses sont répartis dans Paris. Le contrôle des investissements étrangers et le Service de l’information stratégique et de la sécurité économique se penchent sur ce point précis.
En effet, plusieurs sites sont placés à proximité de ministères, d’administrations, d’ambassades ou de sièges de grandes entreprises et présentent ainsi un intérêt stratégique, notamment en cas de volonté de mise sous écoute de ces institutions. Les antennes concernées pourraient en effet être facilement équipées de dispositifs permettant d’intercepter toutes les communications électroniques depuis un téléphone portable, tant les appels et les SMS que le trafic internet.
Questionné par le Monde, le ministère de l’Économie affirme que ” la transaction de rachat par Phoenix Tower International de toits-terrasses dans Paris à la société Cellnex a fait l’objet d’un suivi attentif de l’Etat. […] Les services de l’Etat ont travaillé avec la société pour identifier les risques associés à l’usage de toits-terrasses en France, identifier les mesures à mettre en œuvre pour réduire ces risques et préserver les intérêts fondamentaux de la défense et de la sécurité nationale “. Bercy a le droit de s’opposer à ce genre de transactions si la question de la sécurité nationale se pose, mais ne détaille pas la nature des mesures envisagées ou l’avancement du dossier.
Le ministère explique vouloir « s’assurer que l’accès aux sites d’infrastructures passives [autrement dit, les toits-terrasses] soit conservé au même niveau de sécurité [élevé] afin de garantir l’intégrité des réseaux de communication électroniques ». La crainte d’une mise sur écoute ne vient pas de nulle-part. En 2013, il avait été révélé que le Special Collection Service avait installé sur la terrasse de l’ambassade des États-Unis un dispositif d’écoute permettant d’espionner l’Élysée. Ce dernier était caché derrière un trompe-l’oeil. Si un dirigeant d’opérateur français resté anonyme rappelle que les équipements “actifs” (antennes, boîtiers) installés sur les toits restent la propriété des telcos français, la crainte persiste de voir un organisme accéder facilement à des toits privés pour installer ses propres appareils d’écoute.