Malfaçons dans la fibre : les opérateurs passent à l’action pour sortir de l’impasse avec une armada de solutions
La fédération française des télécoms lève le voile sur de nouvelles actions pour en finir avec les plats de nouilles et les problèmes de raccordement à la fibre. C’est aussi l’occasion de faire le tour de toutes les initiatives mises en places ou en voie de l’être.
Lancé en 2010, le déploiement de la fibre optique constitue le plus grand chantier d’infrastructure en France. Depuis 5 ans, 20 millions de locaux sont devenus éligibles soit une augmentation de 230%, pour un total de près de 15 millions d’abonnés aujourd’hui. Des investissements records et un déploiement accéléré engendrant par la même occasion des malfaçons et des problèmes dans la qualité du réseau et des raccordements sur certaines zones du territoire, en particulier sur les points de mutualisation.
Pour sortir d’une situation compliquée où pas moins d’un raccordement sur 5 s’avère être un échec, la filière et les opérateurs travaillent depuis plusieurs semaines sur des propositions supplémentaires fortes pour renforcer la qualité des interventions. Trois axes majeurs sont aujourd’hui dévoilé par la Fédération française des télécoms.
Conditionner les interventions au suivi par les techniciens d’une formation labellisée par un tiers de confiance
“La formation doit être renforcée et la qualité des techniciens intervenant sur le réseau doit être assurée, y compris dans le cadre d’un contrat de sous-traitance”, note sans surprise la FFT. Pour aller dans le bon sens, la filière propose d’établir des critères de qualité communs entre opérateurs d’infrastructure, opérateurs commerciaux et sous-traitants, matérialisés par un cahier des charges national et des cartes professionnelles délivrées aux techniciens au regard de la formation suivie et du bilan des actes d’intervention réalisés sur le terrain. “À ce titre, le travail de labellisation des centres de formation mené par la plateforme Objectif Fibre pourra être mis à profit. Ces cartes professionnelles, qui pourraient être demandées en cas de contrôle ou d’audit, contribueront à la valorisation du métier de technicien fibre et à la réassurance de l’effectivité de la formation des techniciens intervenants sur les réseaux. Elles pourront être retirées en cas de non-respect des critères de qualité”, apprend-on.
Lancer un plan national de reprises des Points de Mutualisation (PM) dégradés
Les images d’armoire de vandalisées ou dégradées affluent depuis près de deux ans sur les réseaux sociaux, impactant directement les abonnés. “Ces infrastructures dégradées, atypiques, ou dont les systèmes d’information nécessitent une mise en cohérence avec le terrain ont un impact majeur sur l’image de la fibre et génèrent des surcoûts d’exploitation”, fait savoir la fédération. À ce titre, la filière propose le lancement d’un plan de reprise des points de mutualisation dégradés. “Un suivi mensuel de ce plan de reprise pourra être effectué par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep). Un processus industriel de reprise des zones d’exploitation complexes doit également être défini”, propose le secteur.
Améliorer les échanges d’informations autour des raccordements afin de mieux coordonner les différents intervenants
La coordination des différents acteurs comme les opérateurs et sous-traitants est un véritable enjeu. Et il ne faut pas perdre davantage de temps. l’objectif à présent est de pouvoir “partager les plannings d’intervention des sous-traitants sur certaines zones d’exploitation difficile – et de vérifier l’utilisation qui sera faite pour mener des « contrôles à chaud », et, d’autre part, d’harmoniser les critères de recevabilité et d’exploitation des comptes rendus d’intervention incluant des photos. Ces comptes rendus seront intégrés dans le dialogue contractuel de l’écosystème de la fibre”, explique la FFT.
Des actions déjà menées et d’autres en cours
Pour améliorer la qualité des raccordements à la fibre, la filière a déjà mis en place des actions. Fin novembre 2021, le régulateur a d’ailleurs mis les pieds dans ces fameux “plats de nouilles” et lançant son plan d’action pour améliorer la qualité des réseaux comme contrôler les interventions, limiter les rangs de sous-traitance et remettre en état les équipements endommagés.
Depuis fin 2020, la filière tend à prendre le taureau par les cornes, d’abord en lançant un guide opérationnel s’adressant aux professionnels du secteur, puis en annonçant des accords majeurs (mode stoc) entre opérateurs commerciaux et d’infrastructure pour améliorer la qualité et la pérennité des réseaux avant de rendre en juillet 2021 un livre blanc avec diverses mesures pour en finir avec les malfaçons. L’objectif est clair : éradiquer totalement les “plats de nouilles”, ces câbles emmêlés dans les armoire de rue, mais aussi les débranchements d’abonnés au moment d’en raccorder d’autres ou encore les fichiers de déploiements erronés, les installations sous-dimensionnées, mais aussi le travail mal fait chez les clients (prise mal fixée, fils apparents).
Fin 2021, le régulateur a demandé aux opérateurs de développer une application qui va permettre la notification en temps réel des interventions des techniciens aux autres opérateurs commerciaux et à l’opérateur de réseau. Une analyse automatique des photos avant et après intervention a aussi été fortement recommandé et rapidement mis en place.
“Les comptes rendus d’intervention sont pratiqués par tous les opérateurs commerciaux depuis décembre 2021”, commente à ce propos la fédération. Pour aller encore plus loin, un nouvel outil E-intervention, sera livré pour son premier palier entre juillet et décembre 2022, et permettra de signaler, le plus rapidement possible, les interventions et éventuelles malfaçons ou de régler les problèmes de connexion en temps réel. “Les opérateurs, par ailleurs, s’engagent à continuer à développer, améliorer et normaliser ces outils, pour en étendre l’utilisation et parfaire la résolution des problèmes rencontrés.”.
Autre action largement mise en exergue et qui devra être mise en application sur tout le territoire, limiter la sous-traitance à un maximum de deux rangs dans le cadre de la mise en œuvre des nouveaux contrats de sous-traitance (Stoc-2) conclus entre les opérateurs d’infrastructures et commerciaux afin de renforcer la gestion de la sous-traitance.
Enfin, les opérateurs ont entrepris de reprendre les malfaçons constatées : plus de 1700 points de mutualisation (PM) ont été traités depuis 2020 et 2700 sont déjà au programme pour 2022, sur les quelques 200 000 PM en France. reste à savoir si l’ensemble de ces initiatives porteront leur fruit. Un dialogue permanent avec les pouvoirs publics, avec qui l’ensemble de ces sujets est partagé et concerté, est également nécessaire. La satisfaction des consommateurs doit être au centre des volontés.